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“Sylvie Kandé’s poetry is inseparable from the tale of her existence,” writes Édouard Glissant in the afterword of this forceful volume of poetic prose. Lagon, lagunes evokes the journey of a woman who takes stock of the manners in which history and the dominant gaze have shaped her “métisse” identity. Rejecting both spatial and temporal linearity, the narrator explores the deepest corners of memory where both pride, suffering and joy reside. Written in a rich, creative style with many different voices, Lagon, lagunes is a mosaic of literary, historical and mythological fragments.
It is, according to Glissant, “a mestizo text which… brings us to the very edge of that which so tempts us: entanglement, the drunkenness of no longer having to exclude, yes, at last this sort of vertigo. To the edge of the worlds which, so crazily, so lucidly, are aroused within us.” (Gallimard 2000)
Le lukasa, c’est un tableau de mémoire.
Une petite planche de bois incurvée que j’ai placée dans ma main,
parce qu’il restait une dette due,
une honte à boire, des lianes à tresser,
et bien plus encore, sans doute…
Écrire, c’est aussi une façon de compter.
Le lukasa, c’est un labyrinthe et un miroir
où viennent tout bonnement se perdre
[les signares aux yeux surréls comme un clair de lune sur la grève].
Sélèné, sèche signare aux yeux vairs, s’étend sur le sable et demande qu’on vienne la masser.
Le vent glisse un doigt fugace le long de l’arête de son dos, bivouaque au creux des lombes,
y plante un frisson, remonte vers les flancs pour en pétrir le peu de pâte, appuie ses longues paumes sur l’omoplate osseuse, pianote lentement le long des épaules vers la nuque, souffle sur la lisière des cheveux, agace de sa langue le dedans tiède de son oreille.
La gibeuse soupire et s’impatiente.