La quête infinie de l'autre rive évoque ceux qui, par goût de l'aventure, soif de connaissance ou nécessité économique, se lancent en pirogue sur l'Atlantique. Hier, ils étaient des milliers qui, sous la conduite d'Aboubakar II, alias Bata Manden Bori, mirent le cap sur l'Amérique ; aujourd'hui ils sont des dizaines de milliers, qui, dans l'espoir d'atteindre l'Europe, s'embarquent audacieusement sur l'océan. En filigrane, le texte s'interroge sur la possibilité d'une histoire autre, si les expéditions malinké avaient, avant Christophe Colomb, "découvert" l'Amérique.

La traduction allemande par Tim Trzaskalik sera publié au printemps 2019.

Le poète Alexander Dickow a reçu une bourse PEN/Heim (2018) pour en compléter la traduction en anglais.

 
Ils rament désormais sans chanson ni ahan
Depuis combien de temps… savoir… combien de saisons…
depuis combien d’îles-mirages apportées par les vents
ramaient-ils repus de roulis et gavés d’embruns…
Mémoire brouillée de ce-que-c’est-que-d’avoir-les pieds-sur-terre
et paupières en chamade
ils ne se soucient plus à présent que de la vague qui va
                                      se dérobe
                                             et revient
Paysans qui sur le tard s’étaient faits marins
ils cadencent leurs corps
pour fendre de la pointe gâtée de l’aviron
les mottes violettes de la grande savane salée
que nul sillon ne marque
où nulle semence ne lève
(Mais à dire la mer
peu siéraient les mots de la terre)